lundi 12 octobre 2009

roman noir



Nous sommes à Metz.
Le Building Sainte-Barbe et le pont.
Une image dure.
La façade de la barre laisse peu de place à une fantaisie quelconque. Tant mieux...
Certes le pont de béton est beau. Il dit sa franchise d'œuvre de génie civil dans un double arceau qui me fait penser à Freyssinet.
Je ne trouve pas de nom d'architecte ni pour le building ni pour le pont. Je trouve l'ambiance ici particulièrement forte, comme un roman noir.
La rivière au lieu d'apporter un je ne sais quoi de romantisme ou de joie de vivre est suicidaire.
Certainement que l'absence totale de personnage et le noir et blanc plongent cette image dans un récit pathétique et glauque.
Cela me fascine.
Et cela d'autant plus que cette carte postale en édition de luxe Estel est rangée juste à côté de celle-ci :

La gare du stade à Colombes.
Image superbe, digne de Tardi ou de Nestor Burma.
Là, sous les voies de chemin de fer, une petite construction presque moderne, les volets sont tous clos sauf le rez-de-chaussée où je devine un homme assis à la fenêtre et où je vois la porte ouverte.


Je sais ce qui emmène cette image dans une nostalgie cinématographique, ce qui en fait le début d'une histoire.


les deux silhouettes masculines, valises à la main qui passent sous le pont. Petite valise pour l'un, cartable pour l'autre, trop proches pour ne pas se connaître partent-ils vers Argenteuil, quai A comme l'indique la pancarte sur le quai. Les bas de pantalons trop courts, ils ont une allure un rien populaire, mal endimanchée.
Les trois jours du service militaire ?
L'un, celui au cartable, accompagne-t-il l'autre à la valise prendre un vrai train dans une grande gare parisienne pour l'Algérie ou vers une famille une marraine en Lorraine et c'est loin.
J'ai presque le cœur serré chaque fois que mon œil glisse sur la loupe et observe ces deux hommes.
Une tristesse latente.
Pourtant... Pourtant il y a du soleil qui blanchit bien l'angle de la gare du stade. Pourtant tout est tranquille et peut-être vont-ils simplement au lycée ou à l'université. Et aussi une autre silhouette est déjà avalée par le trou.
Non, je suis certain que non.
On ne plonge pas ainsi dans le triangle d'ombre d'une entrée de tunnel, le dos voûté, le col blanc et les cheveux très courts si ce n'est pas pour quelque chose d'irrémédiable.
La carte postale nous indique que nous sommes boulevard de Finlande.